Ethologie

Retour à la Présentation
Retour au Sommaire


Généralités

En raison de la période de l'année à laquelle nous avons effectué notre travail, nous n'avons pu observer que des Cormorans hivernant sur le bassin lémanique. Voici nos lieux d'observation :

Le matériel utilisé pour cette partie pratique se compose de jumelles 10 x 50 et de télescopes d'un grossissement maximal de 60 x. 

A propos des conditions d'observation, il convient de signaler que les Cormorans ont besoin d'une certaine distance de sécurité et qu'il n'a pas été possible de les étudier à une distance inférieure à 100 m. Ils sont très sensibles aux dérangements tels que la chasse ou la simple présence humaine. A Carotte, le 27 mars 1997, nous nous étions approchés à une vingtaine de mètres la réaction a été immédiate : la fuite. Tous les individus se sont envolés, et la plupart se sont posés sur des rochers à une centaine de mètres de nous. 

Le mode de vie du Grand Cormoran se différencie en deux aspects distincts qui sont le mode de vie en solitaire et celui en colonie. Son choix est motivé par ses besoins et les conditions du milieu. La partie qui suit est basée pour la plus grande part sur les observations faites sur le terrain.


Recherche de nourriture

Le facteur principal est la quantité de nourriture disponible. Ainsi, si la faune piscicole est abondante, il optera pour une pêche en groupe (parfois plus de 50 individus), c'est le cas sur les lacs. Il préfère les bancs de poissons, car c'est une nourriture facilement atteignable.

A l'inverse, si les poissons sont peu nombreux, il choisira la pêche en solitaire. Il fait alors preuve d'un sens de l'exploration très pointu. Quand un individu pionnier découvre une source de nourriture non négligeable, il peut y mener ses congénères.

Il fait preuve d'une grande habileté pour la capture de ses proies, en s'attaquant d'abord aux proies les plus facilement accessibles, aux poissons blessés ou malades. Avant de plonger, il peut passer la tête sous l'eau afin d'observer les profondeurs. Puis, il accomplit un petit saut vers l'avant et s'enfonce, propulsé par ses énormes palmes. Pourchassés sous l'eau, les poissons sont saisis avec dextérité et ramenés à la surface, la consommation s'effectuant sur place ou sur la berge.

Nous avons chronométré les temps de plongée de plusieurs individus choisis au hasard sur le lac. La moyenne se situe à 46 secondes, mais nous avons observé un individu qui est resté plus d'une minute sous l'eau. Lorsque ses plongées sont infructueuses, l'oiseau s'accorde de 10 à 20 secondes de répit en surface. La pêche est donc une activité courte et intensive. Ainsi sa durée quotidienne peut représenter moins d'une heure.

Sous l’eau, il se révèle très rapide grâce à ses caractéristiques hydrodynamiques :

En effet, nous avons observé des individus émergeant à quelques dizaines de mètres de l’endroit où ils avaient plongé, et cela en quelques secondes à peine.

Sur l’eau, il nage assez bas, la plupart du temps on n’aperçoit que son dos, son cou oblique et son bec levé. Parfois même, on ne voit que sa tête : cela est dû à la perméabilité de son plumage.




Repos nocturne

Comme nous l'avons souligné précédemment, le dortoir est un élément essentiel pour le Cormoran hivernant. C'est aussi là que la vie en colonie prend l'importance la plus significative. La tranquillité et la sécurité sont les mots d'ordre.

Un petit nombre d'oiseaux restent dans la zone du dortoir toute la journée, tandis que la majorité n'y revient qu'à partir du début de l'après-midi.

Le 11 janvier 1997, à la retenue du barrage de Verbois, nous avons assisté au retour des Cormorans au dortoir. Avant 17 heures, une quarantaine d'oiseaux y étaient déjà posés, et dans la demi-heure qui a suivi, plus aucun oiseau n'est arrivé.

Un mois plus tard, nous avons passé une après-midi dans le port de Villeneuve à observer le dortoir des Grangettes. Tout au long de l'après-midi, nous avons dénombré environ 250 Cormorans sur les rochers. A partir de 15 heures et jusqu'à notre départ (vers 16h30), une cinquantaine d'oiseaux est venue se rajouter à ce nombre. Par contre, sur l'île de Peilz, un seul Cormoran se trouvait posé sur le platane, ce qui nous fait penser que d'autres arrivées étaient encore probables.

De ces deux observations, nous concluons que, bien avant le coucher du soleil, le nombre d'occupants du dortoir est défini. Mais tous les individus partis au matin ne sont pas forcément revenus, car ils ont pu élire domicile dans un autre dortoir. Parfois, ils peuvent même passer la nuit seuls.

Les Cormorans restent souvent fidèles au même dortoir, voire au même arbre, parfois même à la même branche durant plusieurs années. Ils se posent de préférence sur les branches les plus élevées et profitent au maximum de la place disponible, tout en restant très proches les uns des autres. En effet, ils se posent à plusieurs sur une branche (souvent à moins de 50 cm les uns des autres).

Le dortoir ne semble pas posséder une organisation particulière.

L'animal qui dort se tient dans une posture singulière : sa tête, retirée et posée sur son dos, et son bec, sous ses ailes, deviennent presque invisibles.


Repos diurne

C'est sur un reposoir que le Cormoran passe la plus grande partie de sa journée. Il en fréquente de nombreux : des arbres, des souches, des perchoirs aménagés par l'homme (c'est le cas dans le bassin de retenue de Verbois), des rochers, qui, aux Grangettes servent aussi de reposoir nocturne. Cependant, lorsqu'ils n'ont pas un endroit de ce type à leur disposition, ils peuvent également se reposer sur l'eau. Cette baignade semble leur apporter non seulement la tranquillité mais aussi du plaisir.

Posé, le Grand Cormoran digère son repas et vaque à sa toilette. Il se secoue, déploie ses ailes pour les sécher (cf. photo ci-dessous), se nettoie et lisse ses plumes à l'aide de son bec crochu. Par ailleurs, il passe le plus clair de son temps dans une position immobile, trahie de temps à autre par un discret mouvement de tête, qui prouve que l'oiseau reste toujours à l'affût.

Quelques fois, juste après s'être posé sur un rocher, le Cormoran fait quelques petits pas pour ajuster sa position. On remarque alors que sa démarche est lente et gauche à cause de son poids.

A terre, l'oiseau se tient droit, le cou levé, un peu incliné vers l'avant. Solidement campé sur ses courtes pattes, ses palmes énormes étalées sur le sol, il semble prendre appui sur sa queue.


Vol

Le Grand Cormoran décolle avec effort de l'eau ; il est obligé de faire quelques petits pas de course sur l'eau avant de s'envoler. Il est facilement reconnaissable en vol, à cause de son cou tendu et de sa longue queue, sa silhouette ayant la forme d'une croix.

Sur les courtes distances, l'oiseau rase l'eau à grande vitesse avec son battement d'ailes caractéristique, très rapide. Sur des distances plus longues, il prend de l'altitude et peut se permettre de planer. En comparaison avec le vol du Héron cendré, celui du Grand Cormoran semble demander une plus grande dépense énergétique. La vitesse de ce dernier est également plus élevée. Il peut atteindre les 50 km/h.

Le vol s'effectue aussi en groupe. Lors des migrations, on peut apercevoir de grands groupes voler en " V ". Sur des distances plus courtes, par exemple lorsqu'ils quittent le dortoir pour pêcher, les oiseaux volent de manière plus dispersée.

Pour conclure cette partie, nous aimerions relever que ce qui nous a le plus intrigué c'est la communication intraspécifique. Malgré tous les éléments qui soulignent la très grande sociabilité de cet oiseau, nous n'avons pu mettre en évidence aucun signe de communication. Silencieux, les oiseaux semblent agir individuellement et sans contraintes au sein de la colonie. Nous n'avons pas trouvé, par exemple, de trace d'une quelconque hiérarchie.

Quant aux relations interspécifiques, elles ne posent aucun problème. Malgré la " concurrence ", il n'est pas rare de les voir pêcher en compagnie de Harles bièvres ou de Grèbes huppés, sur le Léman. En outre, il ne semble pas faire le moindre effort de défense du territoire, même à l'intérieur du dortoir. Nous avons aperçu, au dortoir de Verbois des Hérons qui occupaient le même arbre que les Cormorans.


Page Précédente - Page Suivante